Gérer le conflit moral : les consommateurs attribuent des capacités mentales moindres aux animaux de laboratoire

Le « syndrome de domestication » inclut des comportements et des traits physiques qui apparaissent chez les espèces domestiquées en réponse aux pressions sélectives inhérentes au processus de domestication. Parmi ces traits, la sociabilité, définie comme l’intérêt et l’attitude positive d’un animal envers un autre membre de la même espèce ou envers les humains (Svartberg, 2007), joue un rôle clé dans les relations interspécifiques (ici, humain-animal), particulièrement chez les chiens domestiques.

 

Le « syndrome de domestication » inclut des comportements et des traits physiques qui apparaissent chez les espèces domestiquées en réponse aux pressions sélectives inhérentes au processus de domestication. Parmi ces traits, la sociabilité, définie comme l’intérêt et l’attitude positive d’un Les recherches menées sur les chiens de compagnie ont montré que l’audace et la sociabilité (ou la socialité envers l’humain) sont positivement corrélées (Barnard et al., 2021 ; Starling et al., 2013 ; Svartberg, 2007). En d’autres termes, les chiens qui sont plus sociables envers les humains sont également ceux qui sont plus audacieux, c’est-à-dire moins craintifs face à de nouvelles situations ou objets.animal envers un autre membre de la même espèce ou envers les humains (Svartberg, 2007), joue un rôle clé dans les relations interspécifiques (ici, humain-animal), particulièrement chez les chiens domestiques.

 

Ce constat conduit à s’interroger sur le lien entre la néophobie (la peur des objets nouveaux) et la sociabilité dirigée vers l’humain chez les chiens errants adultes. Ces derniers évoluent dans un environnement où l’interaction avec l’humain peut être rare et potentiellement risquée. Pourtant, ceux qui montrent un haut niveau de sociabilité envers les humains, par exemple en s’approchant rapidement d’une personne de manière amicale, semblent manifester des niveaux plus faibles de néophobie, c’est-à-dire qu’ils s’approchent également plus rapidement d’un objet nouveau.

 

Cette relation peut s’expliquer par des mécanismes évolutifs similaires à ceux observés lors de la domestication. Les chiens errants qui sont moins craintifs envers les objets nouveaux pourraient voir leurs chances de survie augmenter dans un environnement urbain où les ressources alimentaires dépendent souvent de l’humain. Ainsi, l’exploration d’un objet nouveau pourrait bien être un indicateur fiable de la sociabilité d’un chien errant envers les humains.

 

Une première tentative pour évaluer scientifiquement la faisabilité et la fiabilité d’une batterie de tests comportementaux pour les chiens errants dans leur habitat naturel a été réalisée afin de mesurer les effets de la domestication sur leurs comportements en interaction avec les humains, leurs congénères, et des objets nouveaux (Capitain et al., 2024). Les tests utilisés ciblaient chacun un aspect comportemental spécifique :

  •  le test d’approche à l’humain, mesurant à la fois l’approche volontaire de l’humain par le chien et la tolérance du chien à l’approche d’un humain, la sociabilité dirigée vers l’humain, la docilité et la capacité à interagir de manière amicale.
  • le test du faux chien, évaluant la sociabilité et l’agressivité dirigées vers les congénères. Il utilise un chien en peluche de taille réelle (chien de taille type berger australien) pour observer les premières réactions du sujet, fournissant des informations sur l’agressivité intraspécifique, un trait important dans la transition du type sauvage au type domestique (Plyusnina et al., 2011).
  • le test de l’objet nouveau, examinant la néophobie, l’exploration et la recherche de nouveauté. En présentant un objet inconnu, ce test permet d’évaluer la capacité du chien à explorer de nouvelles situations.

Les résultats de l’étude indiquent que la mise en œuvre de ces tests dans des conditions de rue était faisable, avec une discrimination aisée des comportements observés. La majorité des chiens a réalisé les tests sans montrer de comportement agressif, ce qui montre que leur motivation était maintenue même dans des situations qui durent longtemps et qui leur demandent une concentration et des capacités cognitives développées. Cependant, quelques chiens ont exprimé de l’agressivité durant certaines étapes des tests, par exemple en attaquant le faux chien. Ces agressions étaient considérées comme des réactions de peur face à la nouveauté.

Cependant, les défis liés à la réalisation des tests dans la rue, tels que les perturbations environnementales et la présence d’autres chiens, ont pu influencer la validité des tests où l’interaction humaine était moindre. Par exemple, pendant le test du faux chien l’humain n’intervenait absolument pas pour rassurer, motiver ou indiquer le but au chien étudié, la consigne étant qu’après avoir introduit le faux chien dans le champ visuel du sujet, l’expérimentateur devait rester silencieux et immobile pendant 2 à 3 minutes. Cela signifie que les chiens étudiés auraient pu être plus susceptibles aux distractions extérieures, comme d’autres chiens ou des bruits environnants, pendant les tests où ils interagissaient moins directement avec les humains. Pour limiter ces problèmes, les auteurs recommandent plusieurs stratégies, comme l’ajout de membres à l’équipe pour gérer les perturbations, ou la collecte de données des types de distractions pour mieux comprendre leur impact sur les comportements observés.

Enfin, l’étude reconnaît certaines limites, notamment le biais introduit par la participation volontaire des chiens plus sociables, et par conséquent, la difficulté à tester les comportements agressifs et les réactions de stress dans cette population spécifique. Bien que les résultats soient prometteurs, ils soulignent l’importance de bien choisir les méthodes et d’ajuster les tests en fonction des spécificités de la population de chiens errants étudiée. Les suggestions proposées dans cette discussion, telles que la modification des tests pour réduire les effets d’apprentissage et l’extension des tests à d’autres populations de chiens errants, offrent des perspectives intéressantes pour des recherches futures.

Bibliographie:

  • Barnard, S., Siracusa, C., Reisner, I., Valsecchi, P., & Serpell, J. A. (2021). “Validity of model to assess social temperament in pet dogs”. Journal of Veterinary Behavior, 44, 22-30.
  •  Capitain S, Cimarelli G, Blenkuš U, Range F, Marshall-Pescini S (2024) Street-wise dog testing: Feasibility and reliability of a behavioural test battery for free-ranging dogs in their natural habitat. PLoS ONE, 19(3), e0296509.
  • Plyusnina, I. Z., Solov’eva, M. Y., & Oskina, I. N. (2011). Effect of domestication on aggression in gray Norway rats. Behavior genetics, 41, 583-592.
  • Starling, M. J., Branson, N., Thomson, P. C., & McGreevy, P. D. (2013). “Boldness and behavioral inhibition in domestic dogs”. PLoS ONE, 8(11), e78998.
  • Svartberg, K. (2007). “Individual differences in behavior: Dog personality and performance”. Applied Animal Behaviour Science, 102(1-2), 139-156